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La fameuse dépression du post-partum ou dépression maternelle

La dépression postnatale, parfois mentionnée par les femmes comme dépression maternelle, est l’un des visages les plus familiers et redoutés du post-partum. Il y a même une certaine tendance médicale à résumer toute la complexité et la diversité des difficultés maternelles sous des diagnostics répétitifs de dépression. Aussi appelé dépression post-partum ou périnatale, ce diagnostic est encore trop souvent posé pour expliquer tous troubles maternels émergents. Pouvant se manifester pendant l’année suivant l’accouchement, son apparition est due à une combinaison de facteurs comme les bouleversements provoqués par l’arrivée de bébé, le manque d’équilibre entre obligations et activités agréables, le sentiment d’être submergée par les contraintes, etc.
La dépression du post-partum
Un dépression particulière
Des causes multiples
La prise en charge
Le diagnostic de dépression
L'accompagnement de la mère
La prescription d'anti-dépresseurs
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    La dépression du post-partum, un diagnostic trop tentant…

    Il nous semble logique qu’une femme qui se sent impuissante et même « néfaste » à l’égard de son enfant, réagisse à cet état : tristesse, accablement et abattement ne vont pas manquer de se manifester. Il y a donc bien souvent de la dépression chez ces mères en difficulté et la constater au cours d’un examen médical relève ni plus ni moins d’un simple et banal état des lieux après une inondation. 

    Il y a des mots qui servent à caractériser, il y en a qui servent à éliminer… Le mot dépression gomme tout, évacue la spécificité de la souffrance maternelle et la range dans le cadre d’affections anonymes, dans le prêt-à-porter psychiatrique...
    Jean-Marie Delassus

    Qu’est-ce que la dépression post-partum ?

    Ce qu’il faut absolument retenir sur la dépression post-partum :

    Qu’elle touche 10 à 20 % des femmes.
    Qu’elle s’installe peu de temps après l’accouchement et dure plusieurs mois.
    Qu’elle peut devenir chronique et avoir de longues répercussions sur l’enfant sans soin adéquat.
    Qu’elle doit être prise en charge dans le cadre d’un accompagnement mère-enfant.
    Qu’elle peut, selon les situations, nécessiter un traitement médicamenteux associé.

    Certains témoignages font état de guérison subite, presque « miraculeuse » de leur dépression, évoquant un fait ou un évènement qui subitement les a rendues mères : la reprise du travail, les sourires ou babillements de leur enfant, une ressemblance physique, quelque chose dans le développement de leur bébé… qui est venu les confirmer dans leur maternité, les rassurer sur leurs compétences. 

    Ces revirements subits existent, mais sont rares, bien souvent une dépression non prise en compte s’enkyste durablement ou peut se déplacer sur le bébé qui tombera progressivement malade ou qui deviendra l’objet du ressentiment et de la déception maternels.

    La dépression postnatale n’est pas une dépression comme les autres

    Cette dépression particulière n’est pas toujours évidente à reconnaître et à faire reconnaître. Elle a longtemps été minimisée par le corps médical et, les femmes qui en ignoraient tout, se taisaient par honte de ne pas correspondre au standard classique de la maternité bienheureuse. La seule prise de conscience de leur problème était et est encore aujourd’hui, d’ordre moral : « Je suis une mauvaise mère ».

    La dépression du post-partum n’est d’ailleurs pas reconnue à l’heure actuelle comme une entité singulière, à part des autres types de dépressions. Il n’existe pas de classification internationale bien qu’elle diffère par certains aspects, des formes classiques de cette pathologie : 

    L’anxiété y est plus intense le soir que le matin.
    Les sentiments de tristesse et d’accablement ne sont pas permanents, des moments de répit plus ou moins longs existent.
    Les soins et les gestes de la vie quotidienne sont assurés la plupart du temps : cette dépression entraînant moins de perturbations dans la vie courante.
    Dépression maternelle, Dépression souriante, Dépression de la maternité
    Jacques Dayan

    Du coup, la mère peut se raccrocher à certains instants de plaisir et méconnaître son trouble ou le nier, tout comme son entourage. C’est sans doute la présence du bébé qui l’incite à ne rien laisser transparaître de son mal-être et la pousse à se dépasser sans tenir compte de ses propres souffrances.

    Les caractéristiques de la dépression du post-partum chez la mère

    Il existe tout un ensemble de signes extérieurs qui peuvent orienter la mère elle-même ou son entourage vers la dépression maternelle.

    Comment savoir si je souffre d’une dépression post-partum ?

    La maman peut présenter :

    Des plaintes somatiques récurrentes, notamment un mal de dos permanent.
    Des palpitations, bouffées de chaleur, tremblements, sensation d’oppression, d’étouffement, de vertige…
    Une impossibilité de s’endormir, de se rendormir, un sommeil fortement perturbé par des cauchemars, un endormissement très long, des réveils fréquents, etc.
    Une fatigue constante pouvant mener à l’épuisement.
    Une activité frénétique jusqu’à l’effondrement.
    Une irritabilité permanente.
    Un détachement et une lassitude inhabituelle.
    Des difficultés de concentration : délaisse ses centres d’intérêt habituels, plus de goût à rien, perte d’envie (alimentaire, affective, sexuelle…).
    Des pleurs fréquents ou impossibilités de pleurer même quand l’envie est forte.
    Des colères incontrôlables, sans motifs précis.
    Des pertes de mémoire, des oublis importants même dans les soins du bébé.
    Une anxiété constante, des crises d’angoisses, un sentiment de panique, de danger ou de catastrophe imminente.
    Une culpabilisation omniprésente pour tout et sur tout, avec un fort sentiment de honte de ne pas être heureuse.

    Il est aussi possible que la mère : 

    n’ait plus envie de sortir de chez elle ou au contraire sorte beaucoup, car redoute le moment où elle se retrouve seule chez elle avec son bébé.
    souhaite partir, disparaître, se sent un poids pour tout le monde…
    ait un sentiment de temps arrêté, de temps figé, d’avenir obstrué…
    ne se sente plus aimée et ait le sentiment de ne plus être capable d’aimer.
    ressente un pessimisme global, surtout envers le bébé.
    Le sentiment qu’exprime la mère de ne plus être utile doit alerter, et peut être un signe d’idées suicidaires.

    Observer la relation mère-enfant

    Autour du bébé, la maman peut :

    Ne ressentir aucune émotion ou paniquer devant l’intensité de ses sentiments.
    Être réticence à le prendre contre elle ou au contraire avoir des difficultés à s’en détacher corporellement.
    Avoir la peur permanente qu’il lui arrive quelque chose…
    Peut exprimer son désarroi envers son bébé par des gestes brutaux ou au contraire cacher ses pulsions par des démonstrations d’affection excessives en public.
    Penser continuellement qu’avoir eu un enfant était une erreur, que sa mission est terminée depuis qu’elle l’a mis au monde et qu’elle est interchangeable.
    Ressentir comme une « rivalité d’existence » avec lui, l’un (elle-même) devant disparaître pour que l’autre puisse vivre.
    Connaître des pensées et fantasmes obsessionnels, des phobies d’impulsion qu’elle ne peut chasser et qui l’anéantissent : peur de faire du mal à son bébé, peur d’être incestueuse… à différencier de l’envie de faire du mal à son enfant qui elle, relève de l’urgence psychologique.

    La dépression maternelle, et après ?

    Le diagnostic de dépression postnatale ne suffit pas

    Le diagnostic de dépression, qu’elle soit qualifiée de majeure ou de mineure, n’apporte en lui-même aucune explication clinique quant à la nature des bouleversements observés. 

    Considérer la dépression comme une entité clinique alors que c’est juste une conséquence d’un état d’effondrement qui a eu lieu en préalable n’est pas émettre un diagnostic étiologique. C’est-à-dire ne permet pas d’identifier la cause de l’affection, et les conduites thérapeutiques qui en découleront seront tout aussi limitées. 

    Certes les antidépresseurs prescrits pourront freiner rapidement les angoisses et l’humeur, mais seront sans effet notable sur la relation mère-enfant.

    Les médicaments pour la dépression ne rétabliront qu’une communication logique à défaut d’une communication plus affective, mais cette relation risquera de rester longtemps vide de sens. Leurs effets secondaires ne sont pas non plus négligeables : dans certains cas, ils entraînent un effet « steel face » chez la mère, c’est-à-dire que son visage sera figé. Or c’est dans le dialogue avec le visage maternel que le bébé peut essentiellement lire l’attachement qu’il génère chez sa mère et la confirmation de sa possibilité.

    On fait ainsi, sous couvert d’un diagnostic de dépression du post-partum, l’économie de beaucoup de réflexions et de questions qui pourtant devraient couler de source chez le thérapeute et constituer un préalable à toute véritable prise en charge. 

    N’oublions pas non plus que sous ce diagnostic de dépression s’opère aussi un phénomène d’identification de l’observateur et/ou du thérapeute au bébé et à ses besoins. Il s’agit pour celui qui en est témoin de tenter de « réanimer » cette mère aux prises avec des sentiments mortifères, quitte à plaquer sur celle-ci un début d’explication qui rendrait compréhensible et sans doute acceptable sur un plan moral, ses défaillances vis-à-vis de son nouveau-né.

    Comment prendre en charge la dépression post-partum ?

    La dépression est une notion pragmatique qui banalise et inscrit la difficulté maternelle dans un registre très général qui en occulte toute la singularité et la complexité.

    Comme nous l’avons déjà vu, il ne s’agit pas de qualifier une simple difficulté d’exister temporaire, et d’y remédier avec quelques médicaments et paroles d’encouragement, mais bien d’accompagner sur le long terme une mère dans une transition identitaire délicate et de lui permettre d’assurer la naissance psychique de son enfant.
    Réduire cette difficulté à son versant dépressif comporte un risque non négligeable : on s’inscrit d’emblée dans une prise en charge médicale qui vise des résultats rapides et quantifiables. Il s’agit de freiner au plus vite des effets dépressifs et de rétablir des comportements maternels conformes à ce que l’on attend et exige de l’évènement Maternité : sourires, entrain, optimiste sont requis au plus vite. 

    Le diagnostic de la dépression du post-partum ne devrait viser avant tout que la reconnaissance d’une difficulté relationnelle avec son enfant et d’une évidente inadéquation entre les deux. Ce trouble de l’humeur signe l’installation d’un problème maternel qui porte atteinte à l’identité de la mère et produit un mode de relation pathologique mère-enfant préjudiciable à l’émergence de la maternité psychique nécessaire à celle de la naissance psychique de l’enfant. Il est primordial que le corps médical soit formé à reconnaître la souffrance ou la pathologie maternelle, non pas tant comme pathologie psychiatrique, mais bien comme une difficulté maternelle risquant de retentir sur le bébé.
    Catherine Isserlis
    Pédopsychiatre

    En privilégiant la surface, on évite soigneusement les questions de fond : à savoir celle du bébé, de son origine et celle de la maternité humaine et de son versant psychique.

    La difficulté maternelle qui n’est que l’expression de la maternité psychique « contrariée » se retrouve ainsi au centre d’une temporalité qui n’est pas la sienne, mais celle de protocoles médicaux qui accordent au soin de la dépression un délai d’environ 6 mois pour la traiter. 

    Certes, il y a toujours du soulagement à savoir que ce que l’on vit est issu du registre médical et peut se « soigner » ou du moins se tempérer dans ses effets les plus invalidants (angoisses et troubles de l’humeur) avec des médicaments, mais la tentation est grande alors de se « déresponsabiliser » en se réfugiant derrière le diagnostic de dépression : « Ce n’est pas moi, c’est la dépression qui génère ce que je suis, ce que j’éprouve et ce que je fais ou ne fais pas. » Alors qu’une prise en charge psychologique permettrait à la mère d’aller cicatriser ce « fond d’elle-même » qui est en souffrance. 

    Dans le cas de la difficulté maternelle « c’est bien le cœur qui suppure et le cœur ne peut pas être malade ! »
    Jean-Marie Delassus

    La conception et le soin psychiatrique seraient une façon de faire entendre raison au cœur, de le forcer.

    C’est donc faute d’accueil à la réaction singulière de la mère à sa maternité, et par souci de « normalisation » et de « codage » que l’on parle de dépression. On clôt ainsi la parole du sujet pour aboutir à des paroles plus ou moins détachées de son vécu : la dépression devient un état anonyme où se dilue la singularité de l’individu. La réflexion et la clinique du soignant ne s’exerceront plus qu’à travers l’évolution des symptômes dépressifs ou des épisodes de décompensation.

    La dépression devient le point de départ du suivi thérapeutique, le mètre étalon de la thérapie alors même qu’elle ne représente que la partie immergée de l’iceberg. Peut-on dire alors que l’on passe à côté des causes réelles de la difficulté de la mère ?

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