Urgence
Association Maman Blues
Site non médical de soutien, d'écoute et de conseils dans le cadre de la difficulté maternelle
Adhérer
asso interet general

18 mois pour me sentir enfin mère



Je me souviens, c'était il y a maintenant 3 ans. Cela faisait un mois que j'étais devenue maman pour la première fois, d'une petite O.

Je me suis réveillée un matin et j'ai dit à mon mari « Ce n'est pas normal ce qui m'arrive ». Depuis dix jours je me sens très déprimée, au fond du trou, avec parfois un jour d'euphorie et d'excitation.

Où est le bonheur ?

Cela fait tellement longtemps (5 ans) que nous le désirions et l'attendions cet enfant. Quel bonheur, alors pourquoi est-ce que je me sens si triste, comme dégoûtée de la vie ?

Je n'ai plus envie de rien, je n'arrive plus à dormir, je suis trop tendue, je suis épuisée. C'est l'été et j'ai froid, j'ai des moments de très forte angoisse. Moi qui pleure facilement, là je suis tellement mal que je n'arrive plus à pleurer. Je n'ai pas faim et je dois me forcer à manger. Mon mari me demande : «  As-tu faim ? ». Je lui réponds  « Si O. s'endort oui, sinon non». O. crie et pleure toute la journée.

Je lis qu'un nourrisson dort environ 18 h par jour;  la mienne dort un peu la nuit mais au plus 1 ou 2 heures la journée, et le reste ce sont des pleurs. Cela est devenu mon obsession : qu'elle s'arrête de pleurer et dorme.

Parce que quand elle pleure, c'est comme si c'était moi qui pleurais…

Ou plutôt c'est moi qui échoue à la calmer : dans mes bras, elle ne se calme pas. Quand je l'allaite, j'ai comme une pile électrique dans les bras et après un bébé qui pleure… comment je peux savoir ensuite quand elle a faim ??

J'ai l'impression que je ne l'aime pas, j'ai honte, c'est terrible : comment peut-on ne pas aimer son bébé ? C'est si beau la maternité... Je croyais que le sentiment maternel était livré avec le bébé. Je suis d'une famille du côté maternel où « on aime les enfants » ; ma grand-mère en a eu 8 et a toujours dit qu'elle en aurait bien eu un autre, et j'ai souvent entendu ma mère parler si positivement de la période où mes frères et sœur et moi-même étions « petits ».

Les prémices du mal être

Je crois que tout a commencé à la maternité une nuit à 4h du matin. O. ne dormait toujours pas malgré mes « efforts », je sonne, les aides puéricultrices viennent et me disent tout de suite qu'elles emmènent O. en nurserie; je n'ai pas le temps de dire ouf elle est partie... je fonds en larmes : je suis une mauvaise mère, elle n'a que trois jours et je l'ai abandonnée, je n'ai même pas eu le temps de lui expliquer.

J'ai l'impression que n'importe qui pourrait me remplacer et en plus faire mieux…Finalement, ce que je préfère, c'est lui changer sa couche ; au moins je sais faire, je sers à quelque chose et là elle ne pleure pas… Pourtant je fais tout ce que je peux, je lis des livres, demande des conseils, multiplie les rendez-vous (association pour l'allaitement, sage-femme, ostéopathes, pédiatre, puéricultrice…) ; mais ils sont contradictoires et ça ne m'aide pas.

Maintenant je vois bien que j'avais surtout besoin d'un accompagnement à devenir mère.

Je vais finalement le trouver en allant à une consultation pour l'allaitement : on me demande si O. va bien, je dis oui, mais pas sa maman. Et là, sur les 2 femmes présentes, l'une sourit et l'autre me prend très au sérieux : elle contacte la psychologue de la maternité et m'obtient un rendez-vous pour le lendemain. Nous y allons avec O. et mon mari. Je trouve quelqu'un qui écoute mon mal être et qui me dit que je ne suis pas la seule dans ce cas, elle va m'accompagner - ou plutôt nous accompagner avec O. - pendant un an.

En parallèle, mon médecin me prescrit un traitement antidépresseur. J'étais très réticente, ça a été un pas difficile pour moi ; mais les angoisses étaient trop insupportables et je voulais être mieux pour ma fille.

Le temps a paru bien long pour trouver une main tendue

Il me faudra 18 mois :

  • pour ne plus appréhender de passer une journée seule avec O.,
  • pour ne plus me sentir épuisée dès le réveil, et avoir un mal fou à me lever,
  • pour ne plus être obsédée par le sommeil de O. ,
  • pour ne plus paniquer dès qu'elle ne dort pas comme « prévu »,
  • pour ne plus douter sans cesse de ce que je fais comme maman,
  • pour ne plus chercher sans cesse des signes, des preuves que je suis une « bonne » mère,
  • pour pouvoir laisser O. à la crèche sans pleurer ensuite…

18 mois avec des hauts et des bas,

18 mois pour me sentir la maman de O., tout simplement.

Aujourd'hui je suis maman d'une deuxième petite fille : L. (mais c'est une autre histoire…). Je continue à voir toutes les semaines une psychologue/psychanalyste. Oui, devenir mère a déclenché à chaque fois en moi une tempête, mais j'ai pris conscience de fragilités qui étaient déjà là avant la naissance de mes filles, et décidé d'entamer à long terme un travail sur moi-même.




Isabelle

Soutenez Maman Blues

Maman Blues est une association qui vit grâce à vos dons et adhésions. Sans vous, pas d'affiches, de flyers, des déplacements pour témoigner, de projets soutenus !
Adhérer à Maman Blues, c'est aussi montrer aux pouvoir publics que vous comptez !
Adhérer à l'association
cross-circle
linkedin facebook pinterest youtube rss twitter instagram facebook-blank rss-blank linkedin-blank pinterest youtube twitter instagram