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J'ai accouché, toujours ravagée d’angoisse.



Quand j’étais enfant, j'ai fait avec mon frère, de 2 ans mon aîné, des « frotti frotta » (jeux du docteur) à plusieurs reprises, et ceci s'est arrêté avant mon adolescence. Un jour, alors que j'étais adolescente, j'ai entendu à la télévision ce qu'était l'inceste, et j'ai fait un amalgame, en pensant que c'était ce que j'avais fait avec mon frère. A partir de ce moment, je me suis fortement culpabilisée, et cela m'a paniquée. J'ai gardé cela au fond de moi, je ne voulais plus y penser.

Quand l'enfance ressurgit

A 29 ans, je suis tombée enceinte. J'ai eu une grossesse idéale, j'étais heureuse et je me sentais bien dans mon corps, jusqu'au moment où mon gynécologue m'a annoncé que j'allais bientôt accoucher. Là, j'ai commencé à tomber en dépression : la culpabilité de ce que j'avais fait avec mon frère avait ressurgi.

Cette idée revenait sans cesse, j'en étais affolée.

Un jour, quand je suis allée à la clinique où j'allais accoucher, j'ai parlé, en larmes, de ce que je ressentais, à une infirmière. Celle-ci a été assez froide, on aurait dit qu'elle me jugeait. On m'a fait rencontrer une psychologue à la clinique. Cela n’a pas atténué mon malaise.

Suite à cela, lors d'une visite de contrôle toujours à la clinique, l'infirmière est sortie et a laissé mon dossier ouvert sur la table, et j'ai vu noté dessus : "risque de maltraitance". Alors j’ai été plus saisie de panique que jamais, on aurait dit que le ciel me tombait sur la tête. Sous le choc, j'ai appelé ma mère qui a été stupéfaite. Totalement démoralisée, j'ai appelé la psychologue de la clinique et lui ai raconté. Elle a essayé de me rassurer [sans y parvenir].

Je suis rentrée chez moi et j'ai raconté cela à mon conjoint qui n'était pas au courant de mon histoire d'enfance. Il m'a culpabilisée encore plus, en me disant « pourquoi as-tu raconté cela, ce n'est rien ce que tu as vécu enfant ». Il était en panique aussi, mais lui pensait à sa réputation. Tout cela me plongeait dans un mal-être profond.

A l'arrivée du bébé, l'angoisse était plus forte encore.

J'ai accouché, toujours ravagée d’angoisse. Je me demandais ce que les infirmières pensaient de moi car la plupart étaient froides à mon égard. J'avais peur que l'on me retire mon enfant. J'étais en pleine dépression et je ne me confiais plus qu'à la psychologue de la clinique, qui ne venait pas souvent. A chaque fois qu'une infirmière passait, je me demandais ce qu'elle avait derrière la tête à mon sujet.

J'avais honte.

En même temps, je regardais mon enfant que j'aimais plus que tout, et je ne me sentais pas capable de l'élever, ça m'effrayait. Je me disais : Il va falloir tout faire pour mon enfant jusqu'à ses 18 ans, il faut que je sois là pour lui. Mais je n'avais pas la force. Je me demandais pourquoi je n'étais pas comme les autres.

Mon compagnon était dépassé par mon état et il n'était pas tendre avec moi. Il me disait qu'il fallait que je prenne sur moi et qu'il fallait que j'arrête d'être mal. D'après lui, il serait préférable pour moi, que l'on se sépare et qu'il y ait marqué sur mon dossier, à ma sortie de clinique, que je devais consulter un psychologue plutôt qu'un psychiatre !

Et le couple part en vrille

J'ai pris sur moi pour ne plus montrer ma souffrance, qui était pourtant terrible. J'ai passé mes premières journées avec mon enfant seule, car mon compagnon avait préféré prendre son congé de paternité plus tard pour partir en vacances, et non pour rester avec moi.

C'était difficile : je dormais mal, j'allaitais ma fille, et j'étais depressive. J'étais un zombie. Je ne recevais aucun soutien. Je devais aussi m'occuper des 2 enfants de mon conjoint. J'ai toujours adoré ma fille et j'aurais fait n'importe quoi pour elle, mais j'étais mal avec moi-même et terrorisée par les responsablités de devenir mère.

Je suis allée consulter un médecin qui m'a donné un traitement.

Je cachais tout cela à mon entourage.

Je faisais semblant d'aller bien.

J'ai rencontré des difficultés dans mon couple et un jour, après bien 5 ans de vie insupportable, je suis allée consulter une psychologue, qui m'a fait énormément de bien. Elle m'a fait prendre conscience du fait que j'avais le droit d'aller mal, que mon enfance avait été normale, et que ni la clinique ni mon conjoint n'auraient dû me traiter de la sorte.

Reprendre sa vie en mains

Je me suis alors séparée de mon conjoint. Je suis allée vivre chez ma mère qui m'a soutenue et apaisée. J'ai repris ma vie en main, je suis même retournée à la faculté. J’ai obtenu une licence. Je vis proche de ma famille, ma mère me seconde bien lorsque je travaille. Je me fais toujours aider par ma psychologue qui est excellente.

Ma fille a 8 ans déjà et se porte bien. En fait, grâce au travail que j'ai effectué et que je poursuis toujours avec ma psychologue, j'ai compris un tas de choses qui m'ont fait prendre confiance en moi et en mon rôle de mère.

Je me sens bien dans ma vie désormais et je fais tout pour que ma fille soit épanouie.

J’apprécie le site Maman Blues car il laisse enfin la parole aux mères, sans la peur d'être jugée, et permet de s'apercevoir que l'on n'est pas la seule à avoir souffert au moment de devenir mère.

Je regrette que le personnel dans les maternités réagisse aussi peu, aussi mal, face aux souffrances des mères, alors que son rôle devrait être de les aider plutôt que de les juger. Moi, je demandais de l'aide, et j'ai reçu très peu de soutien et beaucoup de jugements.

Je trouve aussi que l'on devrait davantage parler d'un autre sujet tabou : la sexualité enfantine, pour eviter qu'il y ait des amalgames à l’origine de souffrances comme j'ai pu en traverser.

Aujourd'hui, j'accepte mon histoire (mon mal être à l'accouchement) et je peux dire que je suis moi avec mes difficultés passées et mes joies actuelles.




Marie

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