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Le plus dur pour moi est d'imaginer qu'elle a pu en vouloir consciemment ou inconsciemment à notre enfant.



Partie 1 : Un papa dans la tourmente puerpérale de sa compagne


Mon histoire est la même que celle des autres sauf que je suis un papa.
Il y a 3 mois et demi mon fils a vu le jour, 3 jours après la naissance il y a eu des pleurs de la maman face à la difficulté pour allaiter, 4 jours plus tard elle sortait avec 3 modes pour nourrir son fils (seins, tire lait, biberon).

Au bout du dixième jour, elle a décidé de décharger son trop-plein d'émotion avec ses parents (était-ce déjà le début de ses bouffées délirantes ?), et 2 jours plus tard, elle était en crise complète de délire, avec des pensée morbides. Cette phase a duré pour moi 7 jours en tout.

Dès le 11ème jour elle a été mise sous zyprexa (régulateur d'humeur), alprazolam (anxiolytique), et deroxat (anti-dépresseur). Les bouffées délirantes ont cessé, l'hospitalisation a été évitée, mais son état "dépressif" est resté persistant (difficulté de parler de ses angoisses, de ses émotions …). Cependant elle s'occupait du bébé, sans souci à part le ralentissement dans les gestes et le manque d'assurance. Je sentais que ce n'était pas un rejet de l'enfant mais plus un problème dû à son état et aux médicaments. Mais je ne pouvais imaginer la suite.


Il y a un mois, elle m'appelle affolée, me disant qu'il y a eu un accident de bain, direction hôpital pour le bébé, un accident est si vite arrivé ! Retour 2 jours après à la maison, et 3 jours après rebelote, deuxième accident similaire mais pas dans les même conditions ! Retour du bébé à l'hôpital, et la maman rentre en hôpital psychiatrique. La maman n'étant pas là, je dois apaiser les services sociaux, les pédiatres, les médecins; faire face à la crèche, l'ADMR, la PMI, les hôpitaux, la Sécu… et bien sûr mes propres problèmes (travail, organisation, administrations…).
Je me demande maintenant comment aider quelqu'un qu'on aime et qui souffre, qui me semble avoir du mal à vivre cette maladie. La durée de l'hospitalisation est inconnue à ce jour, mais dans ma tête j'ai des tas de questions sur l'avenir et l'évolution d'une telle maladie dans le temps. Pour le moment, on parle de psychose puerpérale, mais ce diagnostic est fait sur une courte période, et peut évoluer vers une maladie psychiatrique.


Bref je suis un papa qui est heureux d'avoir un magnifique fils mais qui ne peut partager entièrement ses émotions avec la maman. Elle a revu son fils il y a peu de temps, 2 jours, grâce à l'unité parents enfants, mais je ne sais pas combien de temps cela va durer... Quelles sont les évolutions de la maladie, le temps en hôpital, le traitement à vie ou pas, les traces sur le couple que nous formons etc.


Voilà pourquoi je m'associe à vous, car si vous les mères vous n'êtes pas informées de ces épisodes durant les préparations à l'accouchement, les pères le sont souvent encore moins; et pourtant quand ça arrive il faut qu'il affronte des réalités terribles !


Pour les accidents de bain, dès le départ il y a eu des doutes. Lors du premier accident, certains éléments qui ne collaient pas avec ce que j'avais pu voir de mes yeux avec les pompiers et le Samu. Sa psy m'a aussi parlé d'une version des faits qui n'est pas possible médicalement parlant (bébé violet dans l'eau, alors qu'une cyanose bleutée vient plus tard aux lèvres par le manque d'oxygène). Pour le deuxième accident, ça revient au même, mais elle a accepté l'hospitalisation qui lui a été conseillé, donc elle est en hospitalisation libre. Depuis ses bouffées délirantes, j'ai pris un mois de congés. Auparavant, le matin elle était seule à s'occuper du bébé, et l'après midi ses parents venaient la chercher pour être ensemble chez eux.


L'aide qu'on lui a apporté fut minime puisqu'on n'a pas réussi à la maintenir à flot, mais le plus dur pour moi est d'imaginer qu'elle a pu en vouloir consciemment ou inconsciemment à notre enfant. Tentative d'infanticide? Cris d'alerte? Accidents? Perte de conscience? Bipolarité? Je ne sais rien et j'ai peur de ne jamais savoir la vérité : trop dure à dire, impossible à se rappeler ou autre. Ma confiance est en ce moment ébranlée, car elle souhaite rentrer à la maison pendant que je serai en congés; mais je ne sais pas comment elle va se comporter face à moi, au bébé et à la famille en général, ni comment réagir vis-à-vis d'elle. Pour le moment je ne la reconnais pas et c'est dur, très dur ! Ma confiance est touchée, pourtant je veux me fier encore à elle, même si elle ne se confie pas trop aux médecins ni à moi ni à personne sur ses peurs et ses angoisses.

Elle veut une seule chose : s'occuper de son fils et rentrer à la maison.

Mais elle ne dit pas pourquoi elle veut cela, elle ne développe pas ses émotions et moi cela me fait peur, car durant la période où elle restait  à la maison elle était déjà comme ça et les accidents sont arrivés. Mon fils a failli mourir par deux fois avec de l'eau dans les poumons (ce n'était pas grave mais c'est l'une des causes les plus fréquentes de mort du nourrisson). De tels accidents ne sont pas anodins !


Pour le moment je m'en remets totalement aux médecins. Mais sa lucidité actuelle ne cache-t-elle pas son mal-être ? Peuvent-ils le déceler si c'est le cas ? J'ai besoin d'être rassuré et pour le moment c'est loin d'être le cas.


Ma compagne a été hospitalisée au bout de 3 mois, donc peut être que cela va être plus long.

Je ne sais pas ce que pense ma compagne à mon sujet.

Durant sa maladie je percevais chez elle de la jalousie car elle trouvait que je m'occupais de notre enfant mieux qu'elle. A l'hôpital, je l'ai surprise en train d'essayer de dire les mêmes choses que moi en même temps. Elle se reprochait beaucoup de choses, comme être une mauvaise mère ou une mauvaise fille, ne comprenant pas les pleurs du bébé…

Partie 2 : la guerre continue

Il y a 7 ans et demi, je suis devenu papa pour la première fois d'un petit garçon. La maman a eu une grossesse facile, quelques questions mais rien de grave, un très bon accouchement malgré une épisiotomie. Les 45 minutes de sérénité passées dans la salle de travail après l'accouchement furent les seules. Des difficultés d'allaitement ont épuisé ma compagne. Au bout de 3 jours, elle a fait un baby blues et a demandé à rester plus longtemps à la maternité.

Au bout d'une semaine, ils sortent de l’hôpital, la maman déstabilisée par le fait qu'elle a le choix entre trois modes pour nourrir son enfant : sein, tire lait et biberon. Fatiguée, elle ne peut choisir. Normal ! 2 jours, après elle se dispute avec ses parents. Je trouve cela très bizarre la connaissant, mais 2 jours encore après, je la retrouve mutique dans son fauteuil. J'appelle une amie pour l'aider à parler, mais finalement au cours d'une balade, elle adopte un comportement délirant.

Après l'intervention d'un psy, le diagnostic tombe : psychose puerpérale.

Elle doit être placée sous neuroleptique, anxiolytique et anti-dépresseur. Mais 2 mois et demi après, un accident de bain arrive, qui me fait passer 3 jours a l’hôpital pour mon fils. 3 jours après la sortie rebelote. Les services sociaux et le pédiatre refusent de me rendre l'enfant si je ne suis pas suivi et que la mère n'est pas hospitalisée. Elle le sera 1 mois et demi, puis suivie pendant 1 an en UMB. L'année d’après, elle rechute et fait un épisode de mélancolie aiguë qui l'a conduite dans une clinique durant 3 semaines.

Une période d'accalmie suit durant 3 ans, même si je n'ai jamais réussi a retrouver totalement la femme que j'ai aimée.

Depuis le départ, je me suis toujours occupé de mon fils, tellement qu'il m'a appelé longtemps maman.
3 ans après, ma mère décède, et le jour des obsèques, j'amène à nouveau ma compagne aux urgences psychiatriques.

Là, je me dis que ce n'est plus de la puerpéralité.

M'étant renseigné tout au long de ces années, je savais que la psychose puerpérale pouvait déboucher sur une autre pathologie. Je n’étais pas forcément très rassurant pour elle à ce moment -là car moi-même. J'avais un deuil à faire, des soucis de famille et le stress de la découverte d'un cancer qui s’avérera bénin. Elle est partie 6 semaines chez ses parents, est revenue dans un état euphorique assorti d'une folie dépensière. Je n'ai pas accepté un tel changement. Mais j'ai tenu le coup pour nous et j'ai fait des concessions : abandon d'un projet immobilier, thérapie de couple, déménagement.


Cela n'a pourtant rien changé. 2 mois après avoir emménagé dans notre nouvelle maison, elle a rechuté suite a un PV pour excès de vitesse, connu une décompensation psychotique avec déréalisation et dépersonnalisation, un effondrement anxieux. Elle a passé 4 jours aux urgences psychiatriques et est partie chez ses parents en me laissant notre fils.

Trois mois après, elle me quittait en m'accusant d'harcèlement moral, de violences psychologiques et de manipulation…

Ma dernière visite chez sa psy m'a plutôt annoncé un trouble de l'humeur avec de multiples comorbidités, faisant penser a un trouble borderline, schizophrénie et bipolarité.


Les plus anciennes du forum connaissent mon histoire, mais je m’aperçois que 7 ans après les futures mamans ne sont pas plus prévenues des problèmes psy liés à la naissance et donc les papas encore moins. Vos histoires se terminent bien souvent mais pas la mienne et j'en suis désolé.

Un an et demie après la guerre continue pour moi malheureusement et surtout pour notre fils.

Charly84




Charly84

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